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Cergy Pontoise, vendredi 18 octobre 2013

Elle fait le même voyage tous les ans quelque part dans le monde et chaque année ils sont des milliers à se blottir contre elle pour recevoir le darshan,  l’ « étreinte ». A l’occasion de sa venue en France, j’ai pu approcher celle que beaucoup vénèrent déjà comme une sainte vivante. Rencontre.

 

 

« Pouvez-vous venir à 13 heures ? », me demande par email Mathilde Rouyer, chargée de communication d’ETW France, l’antenne française de l’organisation Embrasing The World, créée par Amma. C’est sans réserve et avec une certaine frénésie que je prends la route de Pontoise, en banlieue parisienne.

Vendredi, 13H, je m’attendais donc à l’effervescence dans le hall du Parc des expositions, où pendant trois jours, sont attendues des milliers de personnes, fidèles ou simples curieux.  Au lieu de cela, je me trouve dans une ambiance joyeuse et de recueillement. Sur l’estrade, au milieu de cette salle couverte de moquette, se tient la dame en blanc. Comme une vision irréelle, amplifiée par les images d’une caméra braquée sur elle non-stop, et retransmises en direct sur l’écran géant placé au-dessus d’elle.

Je me dirige vers la salle de presse où m’attend Martine, membre du staff communication. « J’ai une heure et demi à vous consacrer. Sur quel angle souhaitez-vous travailler ? », me demande-t-elle. Poser un angle, c’est choisir la partie de l’information sur laquelle l’article va focaliser son regard. Or, une fois sur place, mon regard est obnubilé par la scène et cette relation privilégiée que chacun semble avoir avec Amma. Je vais alors à l’audace : « Serait-il possible d’approcher Amma ? ». Martine semble tout de suite embarrassée. C’est qu’il va falloir demander un ticket, être patient et attendre son tour. Recevoir l’étreinte est le résultat de quelques heures d’attente.  « Je vais voir ce qu’il est possible. En attendant je vais vous présenter les divers stands et notre staff », fini-t-elle par me dire.

On y croise des familles entières, des hommes en costumes, des personnes âgées en fauteuil roulant, des femmes avec des enfants, tous pieds nus. Les uns attendent sur des chaises qu’on appelle leur numéro pour recevoir le darshan, tandis qu’un groupe de musiciens, chante des mantras ; d’autres se bousculent autour des stands pour une photo d’Amma ou autres produits dérivés, des produits ayurvédiques, des statues de divinités indiennes, ou encore savourer des plats végétariens indiens.

 

Une organisation ficelée   

Tous ces produits sont vendus au profit de l’ONG fondée par Amma, « Embracing the World », qui finance écoles, orphelinats, projets de recherche et aides à l’émancipation des femmes, à travers des formations et des micro-crédits. L’ONG est notamment intervenue après l’ouragan Katrina au Etats-Unis, en 2005, et au Japon après le tsunami de 2011. Son combat en faveur de la paix et sa lutte contre la misère et l’analphabétisme lui ont valu de recevoir en 2002 le Prix Gandhi King pour la paix et non-violence, au siège de l’ONU. En 2006, elle reçoit le prix James Parks Morton décerné par l’Interfaith Center de New York pour son rôle de leader spirituel et humanitaire hors du commun.

Tous les ans, des centaines de  bénévoles, français ou étrangers, s’impliquent dans l’organisation de l’Amma Tour.  « Entre 600 et 700 personnes », me précise Martine, composent le staff d’Amma en France. La plupart sont des femmes, l’aspect frêle et vêtues de blanc, elles sont quelques unes à s’activer énergétiquement autour d’Amma et de tous les aspects de cette manifestation de taille.

A ceux qui s’inquiéteraient d’une éventuelle dérive sectaire, voici ce que déclarait en 2011, Serge Blisko, président la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires: « Elle se contente de lancer un message d’amour et de fraternité universelle ».

 

L’enfant bleu

Amma (« mère ») ou Ammachi (« mère bien-aimée »), est née le 27 septembre 1953, dans un petit village du Kérala, au sein d’une famille de pêcheurs. Selon la légende, elle serait née le teint bleu-foncé, couleur des dieux.

Petite fille remarquable, Soudhamani, de son vrai nom, montra dès l’enfance de nombreux signes inhabituels. Elle commença à marcher à six mois et sa dévotion envers Dieu était une part intégrante de sa vie. Ses parents la trouvaient parfois absorbée dans un état de profonde méditation, totalement perdue à ce monde. Les membres de sa famille, irrités par son comportement auquel ils ne comprenaient rien, la méprisaient et la maltraitaient mais elle acceptait tous les obstacles comme « un moyen employé par le Seigneur pour la rapprocher de lui ».

Celle que les médias ont surnommé « Mère de la Compassion » en raison des nombreuses organisations caritatives humanitaires qu’elle a fondées, se livra pendant des mois aux pratiques spirituelles les plus rigoureuses et les plus austères. Elle devint complètement indifférente aux besoins de son corps, se passant bien souvent de manger et de dormir. Elle embrassait la terre, étreignait les arbres, percevant en tout le divin. Elle pleurait sous la caresse du vent, qu’elle ressentait comme celle de la Mère divine. Elle restait souvent plongée en samadhi (profonde méditation) pendant des heures et parfois des jours, sans manifester le moindre signe de conscience extérieure.

Depuis vingt-cinq ans, des millions de personnes, des Etats-Unis au Kenya, en passant par le Japon, sollicitent son étreinte, son « darshan », sa marque de fabrique.

 

Amour maternel et compassion

C’est en faisant la connaissance de Chidananda, bénévole et disciple, qui m’expliquait tous les bienfaits de la médiation IAM, technique enseignée par Amma, que je suis interpellée par Martine. Elle vient de recevoir le feu vert de la chargée de com pour que je puisse être « étreinte ». Tout se précipite, on me demande d’ôter mes chaussures, déposer mon sac à main et de monter l’estrade.

Enfin, je me retrouve à genoux devant Amma, poussée avec douceur par une de ses assistantes qui me fait enjamber des personnes assises qui attendaient. L’étreinte se fait chaude et ferme. Je me sens enveloppée, cajolée, caressée. J’ai l’impression vertigineuse d’embrasser la vie sainte. Cette femme que j’ai tant observée sur écran géant, me tenait contre son épaule, large et  accueillante. Que se passe t-il réellement durant cette étreinte ? Ça se décrit en superlatifs consacrés au sens profond du sacré…

Deux câlins plus tard, des « oh ma chérie » murmurés en malayalam, sa langue maternelle, elle me regarde, toujours souriante. Sur son front, un point vermillon cerné de blanc, qui me semble plus imposant que sur les photos. Elle me glisse un mala, une pomme, un pétale de rose et un bonbon entre les mains, et sans que j’aie eu le temps de la remercier, sa « brigade » me poussait à me relever et à libérer la place.

 

Armanda Dos Santos 

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